Nétanyahou veut « prendre » la bande de Gaza, mais « pas la gouverner »
Nétanyahou veut « prendre » la bande de Gaza, mais « pas la gouverner »

(Jérusalem) Israël a « l’intention » de prendre le contrôle de la bande de Gaza, mais « pas de la gouverner », a assuré jeudi le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, peu avant une réunion de son cabinet de sécurité pour décider des suites de la guerre dans le territoire palestinien.
Ce qu’il faut savoir
- Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou rencontre jeudi son cabinet de sécurité pour décider de la suite de la guerre à Gaza ;
- Un plan visant « à conquérir l’ensemble de la bande de Gaza, y compris la ville de Gaza et les camps de réfugiés » serait envisagé ;
- Le premier ministre israélien a mentionné « l’intention » de prendre le contrôle de la bande de Gaza, mais « pas de la gouverner » ;
- Des familles des otages détenus à Gaza ont embarqué à bord d’un bateau pour rejoindre la frontière maritime de Gaza, afin de réclamer la libération immédiate des otages et la fin de la guerre ;
- À Gaza, un porte-parole de la Défense civile, a fait état de 35 personnes tuées par des frappes ou des tirs israéliens, dont huit qui attendaient de l’aide ;
- L’OMS a annoncé que 99 personnes, dont 29 enfants de moins de cinq ans, étaient mortes de malnutrition depuis le début de l’année.
« Nous en avons l’intention », a répondu sur la chaîne Fox News le premier ministre, à la question de savoir si son pays comptait prendre le contrôle de la totalité de Gaza.
Mais « nous ne voulons pas garder » Gaza, « nous voulons mettre en place un périmètre de sécurité, mais ne voulons pas la gouverner », a-t-il ajouté.
Cette entrevue a été diffusée peu avant une réunion du cabinet de sécurité à Jérusalem, qui a commencé vers 18 h (11 h heure de l’Est), selon les médias, et doit décider des suites de la guerre, déclenchée le 7 octobre 2023 par la sanglante attaque du Hamas en territoire israélien depuis la bande de Gaza.
En réaction à cette entrevue, le Hamas a accusé jeudi le premier ministre israélien de « sacrifier » les otages dans la bande de Gaza au profit de ses « intérêts personnels » et « politiques », selon un communiqué du mouvement islamiste palestinien.
« Les plans de Nétanyahou pour intensifier » les opérations militaires israéliennes dans la bande de Gaza « confirment sans l’ombre d’un doute son désir de se débarrasser des otages et de les sacrifier dans la poursuite de ses intérêts personnels et de son agenda idéologique extrémiste », affirme le Hamas, qui détient toujours 49 otages, dont 27 sont présumés mort.
« Les déclarations de Nétanyahou représentent un revirement flagrant du processus de négociation et révèlent clairement les véritables motivations derrière son retrait du dernier round, malgré la proximité d’un accord final », a réagi le Hamas.
« Ce que le criminel de guerre Nétanyahou prévoit est la continuation d’une politique de génocide et de déplacement forcé, par la perpétration de nouveaux crimes contre notre peuple palestinien dans la bande de Gaza », accuse le mouvement islamiste.
« Gaza restera inflexible face à l’occupation et à toutes les tentatives d’imposer une tutelle sur elle », ajoute-t-il, promettant que « toute escalade […] ne sera pas une promenade de santé et aura un coût élevé et douloureux » pour Israël.
« Éliminer les menaces »
La presse israélienne annonce depuis plusieurs jours un plan visant « à conquérir l’ensemble de la bande de Gaza, y compris la ville de Gaza et les camps de réfugiés » situés dans le centre du territoire, une opération de plusieurs mois qui nécessitera une mobilisation massive de réservistes.
Alors que la presse s’est fait aussi l’écho des réserves du chef d’état-major, voire de son opposition à ce plan présumé, l’intéressé s’est pour la première fois exprimé publiquement jeudi : « Nous continuerons d’exprimer notre position sans crainte, de manière pragmatique, indépendante et professionnelle », a commenté le lieutenant-général Eyal Zamir.
Et de mettre en garde : « Nous ne limiterons plus notre réponse. Nous éliminerons les menaces à leur stade précoce dans tous les domaines et continuerons à travailler pour atteindre nos objectifs ».
L’armée israélienne occupe ou opère actuellement au sol dans près de 75 % de la bande de Gaza, principalement depuis ses positions permanentes dans le territoire le long de la frontière. Elle bombarde partout où elle le juge nécessaire.
Selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA), 86,3 % du territoire est militarisé par Israël et soumis à des ordres d’évacuation.
Les zones non occupées sont aussi les plus peuplées : les villes de Khan Younès et Gaza, les camps de réfugiés de Deir-el-Balah, dans le centre du territoire.
Après 22 mois d’une guerre dévastatrice, la bande de Gaza, assiégée, est menacée d’une « famine généralisée », selon l’ONU, et totalement dépendante de l’aide humanitaire, toujours distribuée en quantités largement insuffisantes selon les humanitaires.
Quelque 2,4 millions de Palestiniens vivent au quotidien sous les bombes dans cet étroit territoire qui longe la Méditerranée. Les représailles israéliennes y ont déjà fait 61 258 morts, en majorité des civils, selon les données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l’ONU.
Du côté israélien, l’attaque du Hamas a entraîné la mort de 1219 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles.
Israël avait déjà occupé Gaza en 1967 et implanté un ensemble de 21 colonies israéliennes, démantelées en 2005 avec le retrait unilatéral décidé par le premier ministre d’alors, Ariel Sharon.
99 morts de faim
Mardi, M. Nétanyahou a réaffirmé les objectifs de guerre fixés à l’armée : « vaincre totalement l’ennemi à Gaza, libérer tous nos otages et s’assurer que Gaza ne constituera plus une menace pour Israël ».
Entre un « contrôle militaire à court terme de l’ensemble de la bande, une domination militaire à long terme et un possible retour des colonies juives », « l’occupation complète » voulue par Nétanyahou n’est pas du tout claire, analyse le Times of Israël.
L’opinion israélienne s’alarme toujours plus du sort des otages encore retenus à Gaza. La diffusion par le Hamas et le Djihad islamique de vidéos de propagande montrant deux d’entre eux, très affaiblis et amaigris, ont suscité colère et émotion en Israël, mais aussi à l’étranger.
Le Forum des familles en a appelé solennellement au chef d’état-major pour qu’il s’oppose « au sacrifice des otages ! », alors que « 80 % de la population est favorable à un accord global » négocié en échange de leur retour.
Ils étaient encore plusieurs centaines à manifester jeudi soir devant les bureaux du premier ministre. Le matin même, trois voiliers affrétés par des familles d’otages se sont symboliquement rapprochés des côtes de Gaza pour jeter des bouées à la mer et lancer un cri d’alarme : « Mayday ! ».
Nouveau front intérieur pour Nétanyahou : les juifs orthodoxes ont appelé à la mobilisation contre l’obligation de la conscription militaire, à laquelle la plupart échappent pour le moment, et que l’État entend désormais leur imposer. Plusieurs centaines d’entre eux ont manifesté jeudi à Jérusalem.
À Gaza, la Défense civile a fait état d’au moins 35 personnes tuées par des frappes ou des tirs israéliens. L’armée a annoncé avoir intercepté au moins un « projectile » tiré depuis le nord de Gaza, alors que le Djihad islamique a revendiqué le tir de deux roquettes vers un kibboutz frontalier.
L’Organisation mondiale de la santé a annoncé que 99 personnes, dont 29 enfants de moins de cinq ans, étaient mortes de malnutrition depuis le début de l’année, « des chiffres probablement sous-estimés », a souligné le directeur général de l’agence, Tedros Adhanom Ghebreyesus.
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