Haïti : après une violente attaque armée à Pacot, la Cour d’appel de Port-au-Prince s'installe à Puits Blain

Haïti : après une violente attaque armée à Pacot, la Cour d’appel de Port-au-Prince s'installe à Puits Blain

May 25, 2025 - 17:20
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Haïti : après une violente attaque armée à Pacot, la Cour d’appel de Port-au-Prince s'installe à Puits Blain

Dans une indifférence médiatique frappante et au terme d’une cérémonie discrète tenue à huis clos, la Cour d’appel de Port-au-Prince a été contrainte de déménager à Puits Blain, dans la commune de Delmas. Ce déplacement, survenu après une attaque brutale perpétrée par des gangs lourdement armés, symbolise le repli dramatique de l’institution judiciaire haïtienne, contrainte de fuir face à la violence grandissante de groupes assimilés à des forces terroristes.


Ce qui aurait dû être un moment fort et solennel pour la justice haïtienne s’est finalement déroulé dans un silence quasi total. La relocalisation officielle de la Cour d’appel à Puits Blain s’est faite sans aucune couverture médiatique, privant ainsi le public d’un témoignage essentiel. Comme l’a rapporté le journaliste Pierre B. Nicolson Delva de Radio Télé Ginen : « Malgré notre présence sur place, nous avons été empêchés de couvrir la cérémonie inaugurale ». Cette absence de transparence alourdit encore davantage le sentiment d’isolement autour d’une institution déjà fragilisée.

Cette relocalisation intervient dans le sillage d’une attaque spectaculaire survenue le 10 juin 2022, menée par des hommes lourdement armés du gang « 5 Segonn », sous les ordres du redouté chef de gang « Izo ». Ce jour-là, le Palais de justice, situé sur le boulevard Harry Truman, a été littéralement pris d’assaut, forçant juges, greffiers et avocats à fuir dans la précipitation. Ce drame avait déjà entraîné le transfert temporaire de la Cour d’appel vers le quartier de Pacot, où elle a tenté de fonctionner pendant plusieurs années, tant bien que mal. Aujourd’hui, pour la deuxième fois, cette institution est contrainte de déménager, cette fois à Puits Blain — une nouvelle étape dans l’errance d’une justice en exil, poursuivie par la peur et la violence.


Par ailleurs, la Cour d’appel de Port-au-Prince n’est malheureusement pas un cas isolé. Depuis plusieurs mois, c’est toute une hémorragie institutionnelle qui s’opère à Port-au-Prince. Le ministère du Commerce et de l’Industrie, l’Unité de Lutte contre la Corruption (ULCC), la Caisse d’Assistance Sociale, ainsi que les membres du conseil présidentiel de transition, ont tous quitté leurs bâtiments officiels en plein cœur du centre-ville, autour du palais national. Tous ont choisi de s’installer à la Villa d’Accueil, un lieu jugé plus sûr face à l’insécurité grandissante. Cette fuite collective illustre à quel point les institutions publiques sont fragilisées, forcées de se replier face à une violence devenue omniprésente.

Ce phénomène illustre un fait inquiétant : l’État haïtien recule sur son propre territoire. Port au prince, capitale d'Haïti, autrefois centre névralgique du pouvoir administratif et judiciaire, est désormais désertée par ses institutions, incapables d’y maintenir l’ordre et la sécurité.

« Quand la justice elle-même est contrainte à l’exil, c’est tout l’édifice démocratique qui vacille », déplore un juriste contacté sous anonymat.

Des attaques tous azimuts, y compris contre la presse

L’insécurité ne se limite pas aux institutions étatiques. Deux médias de renom, Radio Télé Caraïbe et Radio Mélodie, ont vu leurs locaux attaqués et partiellement détruits par des groupes armés. Ces violences contre la presse, en plus de porter atteinte à la liberté d’expression, compromettent gravement la capacité des journalistes à informer la population.


Alors que la justice vacille et que les institutions fuient, la population haïtienne attend des mesures concrètes pour mettre un terme à cette spirale de violence. Car au-delà des bâtiments désertés, c’est la confiance dans l’État de droit qui s’effondre.

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