Chassé du pouvoir par les rebelles, Bachar al-Assad serait à Moscou

Chassé du pouvoir par les rebelles, Bachar al-Assad serait à Moscou

Dec 9, 2024 - 13:51
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Chassé du pouvoir par les rebelles, Bachar al-Assad serait à Moscou

(Damas) Bachar al-Assad a fui la Syrie vers Moscou, selon des sources médiatiques russes. Le président déchu a été chassé par une offensive spectaculaire des rebelles islamistes, un tournant de l’histoire qui a mis fin dimanche à un demi-siècle de règne sans partage de son clan familial.

M. Assad, qui a pendant 24 ans dirigé d’une main de fer la Syrie meurtrie par près de 14 ans de guerre, se trouve avec sa famille dans la capitale de la Russie, selon les agences de ce pays qui citent une source anonyme au Kremlin.

« Enfin, le régime d’Assad est tombé », a déclaré le président américain Joe Biden, tout en soulignant que « certains des groupes rebelles » avaient des « antécédents de terrorisme ».

Il a affirmé qu’Assad devrait « rendre des comptes » pour les « centaines de milliers de Syriens innocents » qui ont été « maltraités, torturés, et tués ».

En Syrie, des scènes de liesse ont accueilli la chute d’Assad, alors que le chef des rebelles islamistes, Abou Mohammad al-Jolani, a fait son entrée dans la capitale Damas.

« On attendait ce jour depuis longtemps », a déclaré en fondant en larmes Amer Batha, à Damas. « Je n’arrive pas à croire que je vis cet instant ».

À l’étranger, de nombreux Syriens ont exprimé leur joie. En Irak, Yamen promet de « prendre le premier avion pour rentrer », et en Égypte, Mohamed Feras, dit pouvoir « enfin retourner » dans son pays.

PHOTO LOUAI BESHARA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des gens célèbrent avec les combattants antigouvernementaux sur la place des Omeyyades de Damas, le 8 décembre 2024.

À Damas, où les rebelles avaient annoncé un couvre-feu jusqu’à lundi 5 h (21 h heure de l’Est), une partie du palais présidentiel a été incendiée. C’est « devenu un lieu pour le peuple syrien », affirme Omar Khairallah sur les lieux.

À deux kilomètres de là, des dizaines d’hommes, de femmes et d’enfants ont pénétré dans la résidence fastueuse des Assad, qui a été pillée après sa prise par les rebelles, selon un journaliste de l’AFP sur place.

Dans la capitale, comme dans d’autres villes, des manifestants ont renversé et piétiné des statues de Hafez al-Assad, qui a dirigé la Syrie de 1971 à sa mort en 2000, et de son fils Bachar. Des soldats syriens se sont débarrassés à la hâte de leur uniforme.

Le 27 novembre, une coalition de rebelles menée par le groupe islamiste radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS) de Jolani, a lancé une offensive à partir de son fief à Idlib (Nord-Ouest).

PHOTO LOUAI BESHARA, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des gens se tiennent sur une statue renversée de l’ancien président syrien Hafez al-Assad, le 8 décembre 2024 à Damas.

En 10 jours, devant l’effondrement des forces gouvernementales, les rebelles ont conquis de vastes territoires et les grandes villes d’Alep (Nord), Hama (centre), Deraa (Sud) et Homs, avant d’entrer dans la capitale.

Fouille de la prison

Il s’agit de l’offensive la plus spectaculaire depuis le début de la guerre civile, déclenchée en 2011 après la répression sanglante de manifestations prodémocratie et qui a fait plus de 500 000 de morts.

PHOTO GHAITH ALSAYED, ASSOCIATED PRESS

Des soldats et des alliés du gouvernement sont assis par terre alors qu’ils sont arrêtés par des rebelles sur la route entre Homs et Damas, le 8 décembre 2024.

Au moins 910 personnes, dont 138 civils, ont été tuées pendant l’avancée rebelle, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).

À la télévision publique, les rebelles ont annoncé la chute du « tyran » et la libération de tous les prisonniers « injustement détenus », dont ceux enfermés à Saydnaya, une prison symbole des pires exactions des forces de M. Assad.

D’intenses fouilles sont en cours dans la prison lundi, à la recherche de « cellules souterraines cachées, qui contiendraient des détenus », a déclaré le groupe de secours des Casques blancs, qui a dépêché des équipes d’urgence dans la prison. « Les équipes sont composées d’unités de recherche et de sauvetage, de spécialistes de l’abattage des murs, d’équipes chargées d’ouvrir les portes en fer, d’unités canines entraînées et d’intervenants médicaux », a-t-il expliqué.

À la demande de la Russie, principal allié du pouvoir déchu, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunira en urgence lundi à partir de 15 h (15 h, heure de l’Est) pour des discussions à huis clos sur la Syrie, selon plusieurs sources diplomatiques. Selon les agences russes, les rebelles ont « garanti la sécurité » des bases militaires russes en Syrie.

Après ses combattants, Abou Mohammad al-Jolani est arrivé à Damas où il s’est prosterné sur une pelouse avant de se rendre à la mosquée historique des Omeyyades.

« Cette victoire est un triomphe […] pour toute la communauté islamique », a-t-il martelé. « La Syrie a été purifiée. »

Plus tôt, il a demandé à ses combattants de ne pas s’approcher des institutions publiques, ajoutant que celles-ci restaient sous contrôle du premier ministre jusqu’à la « passation officielle ».

PHOTO UGUR YILDIRIM, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Des personnes tirent en l’air alors qu’elles célèbrent la chute du gouvernement syrien à Damas, en Syrie, le 8 décembre 2024.

Le groupe HTS est l’ancienne branche syrienne d’Al-Qaïda qui dit avoir rompu avec le djihadisme, sans réellement convaincre les chancelleries occidentales.

Tout en saluant la chute du pouvoir, plusieurs pays ont exhorté les Syriens à éviter le piège de l’extrémisme.  

La France a appelé la population « à la réconciliation » et le chef de l’ONU, Antonio Guterres, à protéger « les droits de tous les Syriens ».

« Rendre des comptes »

PHOTO LOUAI BESHARA, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Le président déchu Bachar al-Assad

La Turquie, qui soutient des groupes rebelles et accueille des millions de réfugiés syriens, a dit être en contact avec les insurgés pour garantir la sécurité, ajoutant que les nouvelles autorités ne devaient pas « constituer une menace » pour les pays voisins.

Au moins 26 combattants ont été tués dimanche alors que des forces syriennes soutenues par la Turquie ont lancé une offensive dans la région de Manbij, dans le nord de la Syrie, a rapporté l’OSDH.

L’OSDH a aussi fait état d’une série de frappes aériennes israéliennes dans l’est du pays dimanche, précisant que la cadence des frappes s’était accélérée après la chute de Bachar al-Assad.

Le premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou a déclaré que la chute d’Assad était « une conséquence directe des coups » qu’Israël avait « portés à l’Iran et au Hezbollah » libanais.

Face à l’offensive rebelle, le soutien de Moscou, dont les troupes sont mobilisées pour la guerre en Ukraine, s’est effrité tout comme celui de l’Iran et du Hezbollah, sortis affaiblis de la guerre entre le mouvement libanais et Israël, laissant le pouvoir syrien isolé, selon des experts.

PHOTO AAREF WATAD, AGENCE FRANCE-PRESSE

Des combattants rebelles syriens célèbrent après que les forces rebelles soient entrées dans la troisième ville de Syrie pendant la nuit, le 8 décembre 2024 à Homs.

L’Iran, dont l’ambassade à Damas a été saccagée, a prévenu que sa politique était susceptible de changer en fonction « du comportement des acteurs » sur le terrain en Syrie.

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