À quoi s’attendre après l’assassinat ciblé d’Ismaïl Haniyeh ?

Le chef politique du Hamas a été tué le 31 juillet à Téhéran. Ismaïl Haniyeh était le chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien et vivait en exil au Qatar. Sa mort, attribuée à Israël, risque d’ouvrir une nouvelle ère d’instabilité, réagit la presse internationale.

Jul 31, 2024 - 10:56
Jul 31, 2024 - 11:06
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À quoi s’attendre après l’assassinat ciblé d’Ismaïl Haniyeh ?

Le chef politique du Hamas a été tué le 31 juillet à Téhéran. Ismaïl Haniyeh était le chef du bureau politique du mouvement islamiste palestinien et vivait en exil au Qatar. Sa mort, attribuée à Israël, risque d’ouvrir une nouvelle ère d’instabilité, réagit la presse internationale.

Énième escalade des tensions entre Tel-Aviv et Téhéran ces derniers mois, la mort du leader du Hamas, considéré comme une figure relativement modérée et un acteur majeur des négociations pour un cessez-le-feu intervient quelques jours seulement après un tir de roquette sur la ville de Majdal Shams, située sur le plateau syrien du Golan. Une frappe imputée au Hezbollah libanais qui a fait douze morts samedi dans cette localité occupée par Israël.

Déterminé à répondre, Israël a depuis mené une frappe près de Beyrouth mardi soir pour « éliminer » Fouad Chokr, commandant de la formation pro-iranienne que l’État hébreu tient pour responsable de la mort d’enfants sur le plateau du Golan. Si des doutes persistent encore sur le sort de ce dernier, que peut changer la disparition confirmée d’Ismaïl Haniyeh dans le conflit entre Israël et l’Iran ?

Sidération iranienne

Comme le souligne la journaliste du New York Times Farnaz Fassihi sur X, l’une des premières conséquences de cette frappe sur Téhéran est le choc provoqué par la mort d’Ismaïl Haniyeh sur les responsables iraniens. En cause ? L’énorme « coup dur » porté à « la réputation de sécurité de l’Iran à un moment où il veut projeter sa puissance dans la région ».

Une première analyse à chaud, complétée par Vali Nasr, professeur d’études du Moyen-Orient à l’Université Johns Hopkins-SAIS de Washington. Selon lui, la toute récente « investiture d’un nouveau président met l’Iran au défi de riposter » et l’« oblige à prendre une décision et à adopter une ligne de conduite que Téhéran n’avait probablement pas anticipée ou voulue ».

Selon Bobby Ghosh, rédacteur en chef de Bloomberg interrogé sur CNN, ce décès pourrait également avoir un impact sur les négociations de cessez-le-feu à Gaza, où Israël traque sans relâche le Hamas dans le but de l’éradiquer après l’attaque du 7 octobre. Le Qatar, interlocuteur clé du mouvement islamiste palestinien dans les négociations de paix, a d’ailleurs partagé ses interrogations sur l’avenir des négociations pour une trêve à Gaza.

En outre, Firas Maksad, chercheur et directeur de la sensibilisation stratégique pour le Middle East Institute affirme sur CNN que l’éventualité d’une « campagne orchestrée à l’échelle régionale amènerait les différentes milices parrainées par l’Iran en Irak, au Yémen, au Liban et peut-être même à Téhéran, dans une réponse directe à Israël ». Il ajoute que « nous allons connaître plusieurs jours sombres au cours desquels la région sera au bord d’une guerre totale ».

Menaces et craintes de représailles

De nombreuses réactions à l’« élimination » du leader du Hamas permettent déjà d’entrevoir le risque d’une réponse sans précédent du Hamas et/ou de ses alliés. Dans un communiqué, le Hezbollah a affirmé que l’assassinat « va renforcer la détermination des résistants sur tous les fronts à poursuivre le jihad (...) et à affronter l’ennemi sioniste ». Plus directe, la branche armée du Hamas affirme que la mort de son leader aura des « conséquences énormes pour la région ».

Quant au président iranien Massoud Pezeshkian, il a juré de faire « regretter » à Israël cet « acte lâche », après avoir accusé l’État hébreu de l’entière responsabilité de cette frappe. Le guide suprême iranien Ali Khamenei a de son côté promis un « châtiment sévère » à Israël. L’ayatollah iranien considère d’ailleurs que « venger l’assassinat d’Haniyeh est le devoir de Téhéran », car sa mort a eu lieu dans la capitale iranienne.

Alors qu’Israël n’a toujours pas souhaité communiquer sur la mort d’Ismaïl Haniyeh, plusieurs pays ont immédiatement mis en garde contre un nouveau risque d’« escalade dangereuse » du conflit. C’est le cas de la Syrie, qui ne voit rien d’autre qu’un facteur d’embrassement « de toute la région ».

En Turquie, le président Recep Tayyip Erdogan a condamné sur X l’« assassinat perfide » de son « frère » Ismaïl Haniyeh, tandis que Pékin s’est dit « très préoccupé par cet incident ». Un constat similaire à celui de Moscou, pour qui de « tels actes sont dirigés contre les tentatives de rétablir la paix dans la région et peuvent considérablement déstabiliser une situation déjà tendue ».

Grève générale et marches de colère

Conséquence moindre mais inattendue après l’annonce de la mort du chef du Hamas, un appel à la grève générale a été proclamé par les mouvements palestiniens en Cisjordanie occupée, peu de temps avant qu’un deuil national de trois jours ne soit décrété en Iran.

Les forces nationalistes et islamiques de Palestine annoncent aussi « des marches de colère (pour protester) contre l’assassinat du grand leader national », indiquent-ils dans une déclaration commune.

À Ramallah, des employés ont été observés par l’AFP en train de quitter les bâtiments de leurs ministères à la suite de cet appel. Des magasins étaient fermés et des employés ont aussi quitté leur lieu de travail dans plusieurs villes de Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967. Des institutions culturelles ont indiqué dans un communiqué qu’elles resteraient fermées.

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